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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

17 janvier 2014 5 17 /01 /janvier /2014 09:31

C'est un vivant effréné qui a dit : « Ceux qui n'espèrent pas en une autre vie sont déjà morts pour celle-ci. » Laurent de Médicis ne pouvait manquer d'ajouter : Ceux qui espèrent en la vie éternelle sont déjà des vivants de cette vraie vie, et ils ont vaincu la mort.

 

On échappe à la mort dans l'exacte mesure où l'on se donne à plus grand que soi. Déjà, à ce niveau, cette loi se vérifie. Le dévouement aux grandes causes vous égale à elles et vous octroie une durée à leur mesure. Le héros ne meurt pas tout entier.

 

Par contre, l'égoïste, qui se mure en soi et rapporte tout à soi, a trouvé le moyen d'être prisonnier de la mort; l'univers même, à supposer qu'il étende jusque-là ses visées cupides, ne serait que son tombeau.

 

A plus forte raison le chrétien qui se donne à Dieu maître de toute vie et de toute durée, réceptacle éternel des esprits qui se confient en lui, a-t-il échappé à la mort ennemie et trouvé la mort servante.

 

En Dieu, la mort est, comme tout le reste, obéissante à la formule paulinienne : « Tout est pour les élus. » Comme dans les anciennes guerres, le vaincu est ici l'esclave; il tourne la roue qui nous permet d'échapper au temps.

 

Il n'y a qu'une manière d'échapper au temps, c'est de prendre la tangente, tant que se pour­suit la grande giration. Réellement un peu plus tard, en esprit aussitôt, la direction de l'infini est pour nous ouverte. Là est une porte « qui est comme l'orifice d'une ville », dit Claudel : c'est la Jérusalem céleste, dont l'Apôtre nous veut les perpétuels citoyens.

 

« Notre fréquentation est au ciel »; elle n'est pas sur la terre. Nous ne vivons dans le temps que pour préparer notre éternité, qui à tout instant nous invite. Notre être physique est dans la durée et ne peut s'en détacher; l'esprit a le pouvoir de s'élancer au-dessus d'elle, de s'ali­menter au delà, et ainsi, sans cesser d'être lié au temps par les images dont il se sert, par le corps qui le supporte,  il peut mener une vie éternelle.

 

Ne serait-ce pas une consolation? La certitude de la mort est une angoisse ; son évidence acceptée ne l'est plus; on a alors dépassé la zone des alarmes;  on voit la mort derrière soi, comme si le sacrifice était déjà chose lointaine et le passage depuis toujours accompli.

 

Le Fils de l'Homme viendra comme un voleur, nous dît notre Maître : pourrait-on nous voler ce que nous avons déjà donné? Si dès maintenant nous sommes « ensevelis avec le Christ » par le rejet du périssable, dès maintenant aussi nous sommes ressuscites, puisque le ciel nous habite et nous tient pour siens.

 

En vain notre instinct dit que le passé est le présent des morts, et que bientôt toute notre durée sera aussi ce présent vide : nous savons que notre Rédempteur est vivant, que notre présent comme notre avenir, dès que nous le voulons, est l'éternité même, et le regard qui brille sur nous tous, transfigure la tombe tellement qu'il en fait une voie de lumière. Ce regard nous dit : Viens!

 

Extrait de : RECUEILLEMENT. Œuvre de A. D. Sertillages O.P. (1935)

 

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