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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

27 février 2013 3 27 /02 /février /2013 17:16

 

 

 

Il, n'est peut-être pas de précepte sur lequel on se fasse plus d'illusions, que sur celui qui nous condamne tous au travail, de­puis la malédiction prononcée contre notre premier père. Mais, outre cette grande loi, notre propension au mal rend le travail nécessaire à notre vertu.

Le travail nous tire de nous-mêmes ; il tarit la source des réflexions et des raisonnements inutiles ou nuisibles. Dans le temps des consolations, il empêche qu'on ne s'y livre avec excès; dans celui des sécheresses, il soutient l'âme, il fait diversion aux tentations et aux épreuves.

Si l'oisiveté apprend beaucoup de vices, le travail apprend au contraire beaucoup de vertus ; il rend plus patient, constant et sérieux; il lui donne le goût des choses bonnes et utiles ; il élève son âme au-dessus des vanités de la vie, et fournit un but à son activité ; il réprime la fougue de son imagination, et, l'enchaînant à des pensées graves et prati­ques, il prévient ou arrête les écarts de son cœur en le tenant toujours renfermé dans un cercle d'action déterminé ; il dompte sa volonté en la forçant à une action continuelle ; il éloigne du monde, et fait moins désirer ses vains plaisirs et son joug humiliant. C'est une heureuse chose que de n'a­voir pas le temps de faire le mal, et rien n'est précieux pour une jeune personne comme un travail suivi, qui prend telle­ment tous ses instants qu'il ne lui en reste plus aucun pour convoiter ces jouissances qui flétrissent le cœur. « C'est pro­curer un trésor à vos jeunes, disait Mc de Maintenon aux da­mes de Saint-Cyr, que de leur donner ce goût de l'ouvrage. Rien n'est plus nécessaire aux jeunes que d'aimer le travail : il calme les passions, il ne laisse pas à l'es­prit le loisir de penser au mal, il fait passer le temps agréable­ment. L'oisiveté, au contraire, conduit à tous les maux ; je n'ai jamais vu des  fainéants qui aient été de bonne vie. »

Dans les monastères d'Égypte, où les hommes vivaient comme des anges et où le don de contemplation était une des grâces les plus ordinaires, on maintenait cependant le tra­vail des mains. Ils le faisaient, dit saint Jérôme, non pour les besoins du corps, mais pour le salut de l'âme, parce qu'ils savaient que, quelque perfection qu'ils eussent acquise, il leur était impossible de contempler sans cesse les choses divines, et parce qu'ils étaient d'ailleurs persuadés que de demeurer un moment sans contemplation ou sans action, c'eût été s'exposer à la tentation.

Ah ! Si des chrétiens parfaits, détachés de la terre, élevés au-dessus des faiblesses de la nature, se regardaient comme vaincus dès qu'ils se relâchaient dans leurs observances labo­rieuses, que devez-vous espérer, vous qui vivez au milieu du monde comme dans un pays exposé à toutes les attaques du démon, vous qui veillez si peu sur vos sens ? Que pouvez-vous vous promettre, si, avec tout cela, vous ouvrez encore à votre ennemi la plus large porte du péché, l'oisiveté volontaire ? N'est-ce pas agir de concert avec lui et lui livrer votre âme ?

L'oisiveté fomente les passions, elle les fait naître et elle les entretient. L'âme est extrêmement active ; quand on ne la nourrit pas de bons aliments, elle se nourrit nécessairement de mauvais. Il y a dans le monde une infinité de petites misères et de petits riens sur lesquels l'esprit des personnes oisives se jette avec un déplorable empressement, et qui servent de pâture à leur cœur. Ce sont des enfants à qui il faut tous les jours de nouveaux hochets pour les amuser. S'amuser, c'est pour eux s'occuper et travailler.

Les relations sociales viennent alors en aide à l'indolence : ce sont des amies à visiter, à recevoir ; ce sont des emplettes et des courses à faire. Puis tout cela s'espace, s'élargit, bien­tôt se touche ; la journée, le mois, l'année sont remplis, et à peine s'il y a place, ici pour lire un roman, là pour jouer du piano !

La paresse s'allie souvent avec une certaine activité ; mais cette activité, appliquée à de misérables objets, nous fait mettre de la négligence dans nos devoirs, et nous porte quel­quefois à les omettre tout à fait.

Le désœuvrement épuise le corps plus encore peut-être qu'un travail immodéré ; il énerve l'âme, ôte au caractère sa vigueur, à l'esprit sa pénétration, et au cœur sa fraîcheur primitive. Pour se distraire de l'ennui que l'oisiveté ne man­que jamais d'amener à sa suite, l’être humain va demander des consolations et des jouissances à ce qui ne peut lui donner que des regrets et des remords ; cela deviendra un fardeau et se déchargera sur le premier objet agréable qu'il rencontre, du poids des soucis qui l'accablent. Le moindre désir qui souffle sur un cœur affaibli par l'oisiveté suffit pour le renverser. La volonté s'affaisse, le caractère s'amollit, les sens s'exaltent outre mesure, et la vie semble se réfugier tout entière dans le corps, dont le soin devient la seule occupation et le seul travail de la journée.

Une règle de conduite capitale, c'est donc assurément de vous tenir toujours occupée. On va incertain d’un côté ou de l’autre, où l'on se traîne languissamment, où le corps et l'âme pèsent l'un sur l'autre, pour ainsi dire, comme un lourd fardeau, est une situation extrêmement dangereuse pour une jeune personne; c'est la source de mille tentations et la cause des chutes les plus funestes.

Pour éviter ce malheur, suivez le conseil plein de sagesse que saint Jérôme donnait à un de ses disciples : «Faites tou­jours quelque chose, afin que Dieu ou le démon vous trouve toujours occupé. »

 

EXEMPLE: Saint Théophane, martyr.

Sous le règne de l'hérétique Constantin Copronyme, Théo­phane, fils de, l'un des grands de l'empire, orphelin dès l'âge de trois ans, fut élevé par les soins de l'empereur lui-même. Sous cette haute et dangereuse direction, on pouvait tout craindre pour sa foi; Dieu se chargea de la préserver, par le zèle d'une pauvre servante, laquelle déjoua les projets de Co­pronyme et inculqua dans l'âme du jeune enfant la plus vive horreur pour les nouveautés sacrilèges qui trouvaient à la cour de si nombreux adeptes.

La vie de Théophane devint un prodige de renoncement, de pénitence, de sainteté. En 787, il assista au second concile de Nicée où il défendit avec force, contre les hérétiques, la pure doctrine de l'Église sur le respect dû aux saintes images.

Dans les premières années du IXe siècle, Léon "V l'Arménien, l'un des plus ardents ico­noclastes qui fut jamais, voulut attirer à lui le vénérable champion de l'Église ; il le fit amener en sa présence, et lui offrit sa faveur s'il accédait à ses désirs, en même temps qu'il le menaçait de tout son courroux s'il n'embrassait pas la dé­testable doctrine dont il se faisait l'apôtre.

Voici quelle fut la réponse de saint Théophane : « Agé et infirme comme je le suis, je n'ai garde d'ambitionner dans ma vieillesse les choses que j'ai depuis si longtemps méprisées pour Jésus-Christ. Quant à vos menaces, j'espère que le Seigneur me donnera le courage de souffrir, pour la défense de sa cause, tous les sup­plices auxquels vous pourrez me condamner. »

Ce noble lan­gage lui valut une sentence rigoureuse ; jeté dans un sombre cachot, il y resta deux années entières ; puis ce saint vieillard, exténué par l'âge et par les austérités, reçut trois cents coups de fouet qui le réduisirent à la faiblesse la plus extrême. Après cette douloureuse flagellation, il fut envoyé en exil dans l'île de Samothrace, où il expira bientôt.

 

Tiré de : LECTURES MÉDITÉES (1933).

 

elogofioupiou.com

 

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