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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

22 février 2016 1 22 /02 /février /2016 09:47

Les quatre dernières demandes

La seconde partie du Pater est non moins admi­rable ; elle est composée de quatre demandes qui con­tiennent cinq actes d'amour parfait du prochain. Voici le sens de ces quatre demandes :

1. — «Donnez-nous aujourd'hui notre pain quo­tidien»

L'expression « pain quotidien » ne doit pas être prise dans le sens restreint de « nourriture ». De l'avis des meilleurs commentateurs, elle signifie tout ce qui est nécessaire pour notre vie naturelle : nourriture, logis, vêtement, etc., et aussi pour notre vie surnaturelle : grâce sanctifiante, inspirations divines, sacrements et particulièrement le Pain céleste que Nôtre-Seigneur a institué pour la nourriture de nos âmes.

Remarquons que ces moyens nécessaires à la vie temporelle et éternelle, Nôtre-Seigneur nous les fait demander au pluriel, c'est-à-dire pour chacun de nous et pour les deux milliards d'hommes, de femmes et d'enfants qui vivent actuellement dans cette vallée de larmes. Cette première demande contient donc un acte de charité parfaite qui embrasse d'un seul coup toute l'humanité.

2. — «Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés»

Cette demande est évidemment un acte de contrition dont l'efficacité est infaillible. En effet, Nôtre-Seigneur ne nous fait pas demander pardon seulement pour nos péchés personnels; il nous fait demander miséricorde au pluriel, pour les deux milliards d'hommes dont se compose l'humanité actuelle.

Or le pardon des péchés est une grâce incomparable qui comporte non seulement l'effacement de la tache que le péché imprime dans l'âme, mais encore la divi­nisation du pécheur par la production de la grâce sanctifiante et surtout le bienfait incroyable par lequel Dieu se donne Lui-même à son offenseur en lui confé­rant un droit véritable de propriété sur la Trinité tout entière. Il faut en conclure que demander à Dieu de pardonner à tous les hommes, c'est leur vouloir le plus grand des biens, le bien infini. La formule de contrition que Nôtre-Seigneur nous apprend à réciter est en même temps un acte de charité parfaite qui obtient in­failliblement à celui qui le fait le pardon de ses fautes.

« Comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. »

Voilà un nouvel acte de charité d'un mérite spécial, puisqu'il nous fait pratiquer le commandement parfait qui nous oblige à aimer même nos ennemis et à rendre le bien pour le mal.

3. — « Ne nous laissez pas succomber à la tentation »

D'après l'interprétation générale, cette demande si­gnifie : «Ne permettez pas que nous succombions à la tentation» ou, en d'autres termes : «Accordez-nous le secours de votre grâce pour nous aider à éviter le péché.»

Il s'agit donc ici d'une formule de ferme propos qui contient encore un acte de charité parfaite, puisque la grâce d'être préservé du péché n'est pas une faveur que nous demandons seulement pour chacun de nous personnellement, mais pour tous les hommes.

4. — « Mais délivrez-nous du mal »

De quel mal s'agit-il dans cette demande ?

Les théologiens distinguent trois catégories de maux : Il y a, d'abord, les maux d'ordre physique : souf­frances de toute sorte, du corps et de l'âme, qu'on désigne sous le nom d'épreuves et qui sont le lot com­mun de tous ceux qui vivent dans cette vallée de larmes.

On peut évidemment demander à Dieu de nous épargner ce genre de maux, mais personne ne peut

raisonnablement espérer être complètement à l'abri dans ce domaine. Il y a des épreuves inévitables aux­quelles toute personne sensée doit se résigner : telles sont, entre autres, les séparations, les deuils, la mort, etc.

Ces souffrances font d'ailleurs partie des maux que les philosophes appellent «accidentels», parce que, s'ils sont un mal sous un rapport, ils peuvent être un très grand bien sous un autre rapport. Il suffit, par exemple, de les accepter de la main de Dieu pour en faire un bien qui dépasse en valeur toutes les richesses d'ordre naturel. C'est précisément cette soumission à l'adorable volonté de Dieu que Notre-Seigneur nous enseigne à faire lorsqu'il nous fait dire : «Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel

Il y a, en second lieu, le mal moral, c'est-à-dire le péché. Mais il ne peut s'agir de ce genre de mal dans la demanda présente, puisque, dans les deux demandes précédentes, nous avons déjà imploré Dieu d'en être délivrés eu le suppliant de nous pardonner nos pé­chés passés et de nous en préserver à l'avenir par le secours de sa grâce.

Reste enfin le mal suprême : la damnation éternelle, mal que les théologiens qualifient d'«essentiel», car il ne peut être un bien sous aucun rapport.

C'est évidemment de ce mal de la damnation éter­nelle qu'il est surtout question dans la quatrième de­mande et nous supplions « Notre Père qui est aux cieux » d'accorder à tous ses enfants la grâce d'une bonne mort afin de les préserver du sort terrible de l'enfer éternel.

La deuxième partie de l'oraison dominicale se ter­mine donc par un cinquième acte de charité parfaite.

Résumons. Dans le Notre Père, qu'on peut réciter en quelques secondes, Nôtre-Seigneur nous apprend d'abord à nous adresser à Dieu avec la confiance filiale d'un enfant envers son père; il nous fait faire ensuite trois actes d'amour de Dieu, dont deux sont en même temps des actes d'amour du prochain; et la prière se termine enfin par cinq actes de charité parfaite envers le prochain. Le pécheur qui récite cette prière atten­tivement et avec sincérité recouvre infailliblement l'état de grâce et celui qui a le bonheur de posséder déjà la grâce sanctifiante obtient une augmentation de plusieurs degrés de cette même grâce.

L'on est donc en droit de conclure que le Notre Père est une prière vraiment divine, un chef-d’œuvre de simplicité et de concision. Ici, aucune prétention à la littérature, aucun raisonnement savant; l'on va droit au but. Les actes d'amour jaillissent du cœur à coups ré­pétés, comme les explosions d'un feu d'artifice.

Il est à remarquer que Nôtre-Seigneur, dans la se­conde partie du Pater, nous fait prier uniquement au pluriel. Par là, l'oraison dominicale diffère d'un trop grand nombre de prières savantes et éloquentes, où le «moi» et le «je» émaillent toutes les phrases.

Malgré l'extraordinaire perfection de sa formule, la récitation du Notre Père ne produit pas toujours les effets salutaires que nous avons signalés au cours de cet article.

Deux défauts surtout contribuent à en dimi­nuer l'efficacité ou même à la rendre stérile.

° Il y a d'abord le manque d'attention

Le Notre Père est une des premières prières que nous avons apprises par coeur. On nous l'a enseigné à un âge où il nous était impossible d'en saisir le sens; nous l'avons ensuite récité pendant des années d'une façon toute machinale et sans penser au sens des paroles.

L'habitude prise au cours de notre enfance de mar­motter nos prières, sans penser à rien ; cette tendance na­turelle peut durer toute la vie et elle est fort difficile à dé­raciner. Pour la combattre, les maîtres de la vie spiri­tuelle conseillent de réciter de temps en temps quelques-unes de nos prières lentement, en laissant quelques secondes entre les groupes de mots qui forment un sens complet, afin de pouvoir ainsi réfléchir suffisamment au sens de la prière. C'est ce que l'on devrait faire chaque jour pour le Notre Père; et le temps qui semble le plus approprié pour cet exercice, c'est le matin, immédiatement après le réveil. On est sûr ainsi de commencer la journée en état de grâce et le cœur rempli d'amour de Dieu et de charité envers notre prochain.

° Il y a ensuite l'égoïsme

Le second défaut qui vicie notre récitation du Pater, c'est la tendance instinctive que nous avons tous de faire au singulier les demandes que Nôtre-Seigneur nous fait faire au pluriel. En effet, nous sommes tous égoïstes par nature; nous sommes portés à penser d'abord ou uniquement à nous-mêmes; notre salut nous intéresse et le salut des autres nous laisse indifférents. Il arrive donc que quand nous disons : «Donnez-nous aujourd'hui notre pain quotidien», dans notre intention et notre pensée, ces mots ont le sens de : «Donnez-moi»; « pardonnez-nous nos offenses » devient : «Pardonnez-moi...»

Il faut réagir contre cette tendance égoïste et se rap­peler que le moyen le plus efficace d'obtenir beaucoup pour soi, c'est de demander beaucoup pour les autres. Nôtre-Seigneur, en effet, nous a avertis expressément qu'on nous traitera avec la même mesure que nous aurons traité les autres.

Extrait de : LES PLUS BELLES PRIÈRES. Léon Lebel S. J. (1950)

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