Aux prises avec des ennemis de mauvaise foi, qui ne désarment pas, le Christ veut cependant les convertir, tout au moins les convaincre d'erreur, afin qu'ils ne fassent pas trop de mal autour d'eux. Dans la discussion rapportée par l'évangile d'aujourd'hui, il emploie un double argument ; 1° Psychologique, 2° Objectif.
1° Argument psychologique. — Comme homme, il est l'envoyé du Père ; comme Verbe, il procède de lui ; ce qu'il enseigne est donc de son Père. Comment s'en rendre compte : Voici le moyen : « Si quelqu'un veut faire la volonté de Dieu il saura si ma doctrine est de Dieu ou si je parle de moi-même. » (Joan., 7, 17). Commençons par accomplir le devoir connu, ce que Dieu impose, et que l'on sait, au moins confusément. Parce qu'il y a affinité entre les convictions et la conduite, on sera sympathique à une doctrine dont on expérimentera la bienfaisance.
Au surplus, la bonne volonté de l'homme attire celle de Dieu. La bonté de la vie écartant les obstacles qui encombrent la route de la foi, celle-ci, à son tour, réagira sur la pratique du devoir. L'âme est ainsi conduite à s'ouvrir largement à la lumière ; elle s'y donnera tout entière et en vivra.
Lorsque baisse notre esprit surnaturel, que nous nous constatons hésitants, que nous sommes sur la pente de l'imperfection, parce que dans, une atmosphère un peu trouble, réagissons par volonté, tenons à la ligne la plus généreuse, nous ne tarderons pas à voir plus clair, à nous sentir plus sûrs des principes, plus tonifiés par leur influence vitale.
Usons du même procédé à l'égard des chercheurs de la vérité. Conseillons-leur d'obéir d'abord aux injonctions de la foi, de veiller à la valeur morale de leur vie. Bientôt cesseront leurs indécisions, et s'ils sont sincères, ils adhéreront pleinement à une croyance qu'ils sentiront divine parce que surélevant.
O Maître, votre enseignement est de Dieu, je vous demande instamment d'en maintenir la plénitude en mon esprit, avec toute s'a limpidité, sa clarté et sa puissance d'impression sur ma volonté. Que nies convictions soient fermes, que ma conduite s'harmonise avec elles.
2° Argument objectif. — Un autre critère de la valeur d'une doctrine, c'est la conduite de celui qui la préconise. « Celui qui parle de soi-même cherche sa propre gloire. » (Joan., 7, 18). Chercher un succès personnel par un enseignement n'en élève pas l'origine. Jésus ne fait pas ainsi : «Il cherche la gloire de Celui qui l'a envoyé. » (Ibid., 19). Ce qu'il dit, il ne le dit pas de Lui-même, il n'est que l'écho de son Père de qui il vient, aussi sa parole est véridique, elle possède toute autorité. Ses ennemis s'en apercevront malgré eux ; ils diront un jour que personne n'a parlé comme lui, qu'il n'y a rien à faire contre l'impression que produisent ses discours.
Lorsque nous voulons convaincre un ignorant ou un ennemi de notre foi, toute notre force est dans notre fidélité à n'être que les transmetteurs de la vraie, de l'authentique, de la divine parole du Christ. Faisons connaître l'Évangile, c'est le grand moyen. Ce qui est humain, ce qui sent la recherche personnelle, ce qui relève du naturalisme, aboutit fatalement à un échec.
Un apôtre qui se prêche lui-même perd son temps, perd les âmes. On récolte ce que l'on sème ; or, nous devons récolter du divin, semons donc du divin. Avec cette décision positive, nous pouvons marcher avec confiance.
Seigneur, je suis, comme vous, entouré d'esprits plus ou moins prévenus ; je voudrais les gagner à la vérité. Cela m'est impossible si je ne suis pas le prédicateur de cette vérité, c'est-à-dire, de vous-même tout seul. Remplissez donc mes pensées, dirigez mes paroles, afin que, à l'instar de saint Paul, je puisse me rendre ce témoignage : «Je prêche Jésus crucifié.» (1 Cor., 1, 23).
Extrait de : Méditations quotidiennes de Mgr A. Gonon (1947)
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