Il n'y a pas eu de commencement aux lumières célestes. Dieu est éternel. En Dieu, la création elle-même est éternelle. Sorti de lui pour son immense déroulement temporel, l'univers revient au contact. De ce fait, il revêt une pleine clarté, une immobilité qui n'est pas inactivité, qui est pourtant cessation des recherches, arrêt de ces remous qui font ressembler le cosmos à un monstrueux bouillonnement, à une mer bouleversée.
Les nouveaux cieux et la nouvelle terre du prophète donneront un jour leur sens aux énigmes de l'univers, comme le salut individuel justifiera nos vies souffrantes et imparfaites.
Le « parfait » de l'Être entier doit venir. Tout tend à cette spiritualisation, à cette harmonie où la douleur et le mal n'ont plus de part, où l'activité n'est plus « l'acte de l'imparfait » qui se cherche, mais « l'acte du parfait » qui s'exprime. Aux cieux catastrophiques de la science, à la terre catastrophique de la géologie, à l'histoire catastrophique de notre humanité en son tout et en chacun de ses êtres, doit succéder un état de fixité conforme à l'idéal créateur : trace authentique ou image pure que ne sont jamais maintenant les créatures matérielles ou pensantes.
Quand un rayon de soleil entre dans une pièce, lui-même ne se voit pas; ce qu'on voit n'est que la danse des poussières de l'air, qui reçoivent et nous révèlent sa lumière : ainsi la clarté pure de la pensée créatrice n'apparaît qu'indirectement dans la danse des choses. A l'égard de cette clarté parfaite, toutes créatures changeantes ne représentent qu'un système d'impuretés.
Un jour doit venir où la lumière absorbera les poussières, où la danse, trop inharmonique dans un système de tournoiement affairé et tourmenté, fera place à une chorégraphie régulière, à un règne de l'idée qui maintenant travaille, à un tranquille équilibre de ce qui aujourd'hui s'épuise dans des convulsions.
Une nébuleuse spirale est une forge; un soleil est un tison et une planète une étincelle éteinte : on veut voir le produit de cette fabrication frénétique.
L'univers naît : il doit vivre. L'univers court : il doit arriver là où il va. Nous ne savons rien de son aboutissement, sachant si peu de son être; mais avec les François d'Assise, nous l'aimons, aimant Celui qui l'a fait.
Nous répondons pour lui à Celui qui l'appelle et l'attend, comme nous-mêmes il nous appelle et nous tend les bras. La maison et l'habitant ont une même destinée, en somme. Ame, corps, univers, tout cela, à la vérité, ne fait qu'un : nous avons le droit de penser que tous les fils d'Adam qui l'auront voulu, tous les fils de ses frères, les Adams — s'il en est — de tous les mondes, se retrouveront un jour tous ensemble, auprès de Dieu, dans ce jardin de délices que sera alors l'univers.
Extrait de : RECUEILLEMENT. Œuvre de A. D. Sertillages O.P. (1935)
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