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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

31 mars 2014 1 31 /03 /mars /2014 00:06

Il faudra payer. Les dettes morales sont de toutes les plus sacrées, et l'Évangile nous avertit que dans le royaume des cieux on tient compte de la « dernière obole ».

 

Par le péché, nous exerçons notre volonté contre l'ordre : il est juste que l'ordre exerce, d'une façon ou d'une autre, son droit de revanche contre notre volonté. Quand cette même volonté, redressée, consent à la vindicte des choses, où elle voit l'instrument d'un droit éternel, la souf­france revêt un caractère nouveau, plus noble encore, peut-être, que celui de la souffrance qui épure. Celle-ci nous hausse; mais elle ne nous fait pas justiciers. Ici, bien que la justice soit matériellement subie, elle est moralement exer­cée; elle est vraiment nôtre, puisque nous l'ac­ceptons librement, puisque, dans le meilleur cas, nous l'aimons, pour l'amour des attributs divins et en union avec leur règne.

 

Là où parfois l'acceptation devient difficile, c'est quand la souffrance est le fait de l'injustice humaine. Celle-ci fait écran. Nous la voyons, elle, et notre âme s'en révolte.  Nous ne voyons plus la justice de Dieu. Mais un tel déplacement de point de vue, s'il est naturel au premier abord, ne peut retenir longtemps une âme profonde.

 

Que nous importe la justice des hommes ? En face de nous-mêmes et de Dieu, nous ne subissons jamais que des justices. Est-il « juste » — puis­que nous tenons tant à ce mot — de risquer d'in­tervertir soit les causes, soit les compétences ?

 

Autrui a ses responsabilités; moi j'ai les miennes. Pour les responsabilités d'autrui, Dieu est le juge compétent, non pas moi. Pour mes responsabilités, Dieu est juge avec moi; je suis juge avec Dieu, qui me veut bien pour collabo­rateur dans l'œuvre de justice, comme dans tout autre événement de ma vie ou de la vie d'autrui.

 

Je retrouve ainsi, au-dessus des apparences et des réalités étrangères, la grandeur dont risquait de me faire déchoir un puéril sentiment de ran­cœur ou de vindicte. Je ne traîne pas mon frère à mon tribunal; je l'accepte humblement comme l'exécuteur providentiellement prévu des hautes œuvres divines. Ce n'est pas à lui que je me soumets ainsi, c'est à Dieu, et c'est en quelque sorte à moi-même, qui par la compréhension et l'amour me suis haussé jusqu'à la droite du Père, jugeant, avec le Christ, les « douze tribus d'Israël », y compris moi, leur coupable enfant.

 

Extrait de : RECUEILLEMENT. Œuvre de A. D. Sertillages O.P. (1935)

 

elogofioupiou.over-blog.com

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