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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

26 mars 2014 3 26 /03 /mars /2014 00:26

S'il y a du néant, dans la douleur de l'homme ou de l'infini, ce qui est la même chose, c'est que la douleur humaine n'est pas de Dieu.

 

«C'est l'homme ennemi qui a fait cela », dit Jésus en parlant de l'ivraie semée au champ de son Père. C'est Satan, l'ennemi surhumain; mais c'est avant tout l'homme lui-même, l'homme ennemi de l'homme, contre qui, sans lui, rien ni personne ne prévaudrait.

 

Dieu avait fait la vie, non la mort; il avait fait la croissance et le bonheur, non le recul et la chute. Nous avons tout gâché. Notre Christ, qui a tout réparé, n'a pas pour cela tout boule­versé en écartant la douleur du monde. Il l'a changée de signe.

 

De la douleur ennemie il a fait la douleur servante. C'était plus difficile; c'était aussi plus grand; car de cette façon le paradoxe n'est pas seulement aboli; il est renversé. La vie n'est pas seulement arrachée à la douleur oppri­mante; elle en est accrue, et sa définition ne sera plus celle d'un tranquille achèvement, mais d'un dépassement héroïque, comme toujours l'obstacle sauté fait un pas plus grand.

 

Seulement, nous avons le redoutable pouvoir d'annihiler, chacun pour chacun, l'œuvre ré­demptrice. La douleur vaincue peut reprendre son pouvoir. Il suffit pour cela de s'éloigner de la croix, ou de la trahir en trahissant Celui qui y souffre. Loin de Jésus-Christ, nous retombons sous l'empire des forées dont il est le régulateur ou le dompteur au service de ses frères. La rédemption cède alors à la création disloquée par nous, rétrogradant vers le rien et retrouvant l'infinie vacuité qu'est la vie éloignée de son Principe.

 

« Les hommes choisissent eux-mêmes, librement, leurs maux », disent les Vers pythagoriciens. Notre sort est entre nos mains, comme notre vertu, comme notre vouloir. Décidant bien, agissant bien, tout nous est ami; nous disposons de la force des mondes.

 

Agissant mal, nous sommes sous ces forces comme sous la montagne, les Titans punis.

 

Sans aller jusque-là, que de fois nos douleurs prennent empire sur nous parce que nous leur avons donné occasion de puissance. Nos douleurs sont souvent nôtres en ce sens que nous les créons, soit par nos imaginations passionnées, soit par l'effet de nos erreurs, qui reviennent sur nous et nous frappe. Nous ruminons alors sottement, orgueilleusement, au lieu d'accepter la leçon des  événements et le jeu de la Providence.

 

Il se peut bien que des tourments de notre fabrication soient aussi cruels que d'autres; mais n'est qu'une raison de plus de réformer notre sensibilité et d'écarter ses fantômes.

 

En toute hypothèse, la douleur est ennemie quand nous le voulons et amie si nous le voulons. Il nous appartient de choisir l'amitié de la dou­bleur, en gardant et en cultivant l'amitié de Dieu.

 

 

Extrait de : RECUEILLEMENT. Œuvre de A. D. Sertillages O.P. (1935)

 

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