Il faut voir, comme il est important, que les artistes restent dans la vérité historique et la vérité dogmatique, phares de leur sensibilité artistique, dans l'Art sacré.
Vérité historique. Le Crucifix doit d'abord être conforme à l'Évangile, quant à la Croix et au Christ supplicié.
a) La Croix. Une vraie croix, et non pas de légères baguettes ou de simples fils de fer croisés. Pas de ces croix de fantaisie mondaine, dont la forme et la décoration font oublier totalement l'instrument de supplice sur lequel le Christ fut immolé. La Croix du Christ comportait deux poutres croisées, pouvant porter son Corps étalé, bois assez large pour qu'on pût y planter les clous du crucifiement, Croix pesante à porter, puisque le Cyrénéen dut aider Jésus tombant écrasé sur le Chemin du Calvaire.
b) Le Christ. On doit le représenter souffrant et mourant pour le salut du monde. Les grands maîtres, Giotto, Fra Angelico (souverain modèle), Rembrandt, Van Dyck, Rubens, Vélasquez, nous ont laissé des chefs-d'oeuvre de Crucifix, pas encore dépassés par les modernes, qui montrent le Christ dans les diverses attitudes de ses derniers moments en croix : torturé par la souffrance, levant vers le ciel des yeux suppliants, criant sa soif ardente, penchant la tête vers sa Mère et vers son Disciple bien-aimé, ou vers le Bon Larron, lançant son dernier et formidable cri pour remettre son âme entre les mains de son Père céleste, enfin la tête tombante après le dernier soupir... Tout cela est conforme à l'Évangile.
Vérité dogmatique. L'artiste doit représenter un HOMME - DIEU : l'Homme souffrant et mourant, mais aussi le Dieu Homme, qui domine la scène du Calvaire de sa Majesté royale. Par son attitude, par l'expression de sa Sainte Face, la divinité de Jésus doit encore resplendir jusque dans la mort. . . Le cadavre suspendu en croix est toujours uni à la divinité du Verbe. Le Crucifix doit donc représenter le Mystère de la Rédemption dans son intégrité, et non pas un Christ mutilé de sa divinité, ni une Rédemption manquée. Sans doute, David, Isaïe, Jérémie ont prophétisé les humiliations et les souffrances du Messie ; mais leurs descriptions émouvantes se terminent toujours par un chant de victoire, le Seigneur écrasant ses ennemis. Aussi l'Apôtre s'écrie-t-il dans l'Apocalypse (5, 12) : « Il est digne, l'Agneau qui a été immolé, de recevoir puissance, richesse, sagesse, force, honneur, gloire et louange ! »
On doit regretter que des artistes s'arrêtent de préférence aux textes qui représentent la Victime du Calvaire dans toute l'horreur de son supplice. Ils en oublient la divinité du Christ, sa Majesté royale, son sacerdoce, sa victoire, la promesse de sa résurrection et de son ascension. De tels Crucifix auraient satisfait l'hérétique Arius (IVe s.) qui niait la divinité du Christ, ou le philosophe moderne Nietzsche (+ 1900) qui proclamait que Dieu est mort (dans le sens athée).
Extrait de : La CROIX, étendard du Christ Roi. Chanoine Georges Panneton
Édition LE BIEN PUBLIC (1972)
Trois-Rivières, Canada.
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